Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

LA PLUME ET LE ROULEAU

LA PLUME ET LE ROULEAU

250 chroniques éclairent le présent à la lumière de l'histoire


1963 : La parfaite ATTAQUE DU TRAIN GLASGOW-LONDRES

Publié par La Plume et le Rouleau sur 10 Avril 2001, 10:08am

Catégories : #Crimes & affaires judiciaires

Mes Chers Amis, aujourd’hui c’est la saint Parfait.

La perfection...

Certains la recherchèrent dans l’exactitude scientifique. D’autres dans la philosophie, la théologie, l’extase mystique.
 
D’autres dans le crime. Tremblez ! Lecteurs, car c’est une page sombre (mais toujours passionnante) de l’Histoire, que je vais vous compter aujourd’hui...
    
Agir, manipuler, commander, diriger. Mais en restant dans l’ombre et sans jamais apparaître, telle fut l’ambition d’un personnage dont les moyens financiers lui permettaient suffisamment de dilettantisme pour s’affranchir de la nécessité de travailler (ça existe). Hélas, ce n’est pas au service du bien que cet homme se consacra.
 
Non, mes Chers Amis (le croirait-on ?) cet homme mit son intelligence et son talent au service des FORCES DU MAL ! Anglais (ne voyez dans cette association d’idée aucune malice) il décida de commettre un forfait dont la perfection ruinerait les efforts des limiers (pourtant sagaces) les plus fins de la Police de Sa Très Gracieuse Majesté.
 
Y parvint-il ? Je vous invite à le découvrir en actionnant la machine à remonter le temps, pour nous retrouver, en quelques secondes, dans les sombres et humides brouillards du Londres des années 60 (n’oubliez pas votre cache-nez).
 
VVVRRROOOUUUMMM ! ! !
 
POF ! Nous sommes en 1963. Depuis 1955, un homme a mis au point un plan pour réaliser le hold-up du siècle. L’argent n’est pas le mobile véritable, plutôt une certaine forme de jeu, de défi. Il a pour cela contacté la pègre londonienne. Tous les gangs les uns après les autres. Mais l’affaire demande trop d’organisation, de patience, de moyens. Tous refusent. Alors l’homme va employer une autre technique : il va contacter anonymement et individuellement deux malfrats, Bruce Reynolds et Ronald Biggs qui, à leur tour, vont recruter 14 hommes de main de leur choix qu’ils vont former. Ils les feront notamment embaucher dans les Postes et les Chemins de Fer britanniques pour leur faire saboter certains wagons blindés qui, du coup, seront remplacés, durant un bref laps de temps, par de vieux wagons avec des portes en bois.
 
L’organisation est entièrement cloisonnée : les hommes ne se connaissent pas entre eux. Biggs et Reynolds ne connaissent pas leur commanditaire. Aucun ne sait la nature exact du projet pour lequel ils sont sollicités. Ils ne connaissent que leur boulot : une tâche parcellaire, définie, aboutie, simple, qu’il doivent exécuter avec une exacte perfection. Au-dessus d’eux, un homme pilote et coordonne. C’est le « cerveau », « the brain » dans la langue de Shakespeare (et aussi de Scotland Yard). 
Bientôt, l’ensemble du plan est au point : il s’agit de l’attaque du train postal Glasgow-Londres. A cette époque où l’informatique bancaire n’existe pas, les postes transportent en effet, de nuit, non seulement des paquets et des lettres mais aussi des valeurs et de l’argent liquide (paies d’entreprise, virements interbancaires, etc).
 
Le train Glasgow-Londres, qui doit être attaqué, renferme pour sa part des sacs de billets que la Banque d’Ecosse remet à la Banque d’Angleterre. Butin prévu : 2,6 millions de livres, 110 millions de francs de l’époque soit environ 40 millions de livres de 2013 (47 millions d'euros ou 63 millions de dollars) !
 
L’attaque est fixée à Bridego Bridge, à 40 kms de Londres à 3 h 03 du matin le 8 aout 1963.
 
Les bandits masquent un feu vert avec un gant puis allument un feu rouge. Le train s’immobilise. Les mécaniciens pensent à des travaux, fréquents sur la ligne, ils sont vite assommés. Pour ne pas éveiller les soupçons des gardes postés dans les wagons, les attaquants font alors repartir et avancer lentement le train jusqu’à un pont. Puis ils défoncent brusquement les portes en bois des wagons et ligotent les convoyeurs qui n’ont pas le temps de se défendre. Le déchargement des 128 sacs de billets ne prend que 17 minutes. Les assaillants prennent la fuite. Pas de mort, pas de sang, pas de bavure. Le hold-up parfait.
 
Avant de partir, l’un des hommes lancent : « Ne bougez pas avant une demi-heure ! »
 
Le partage est vite fait, dans une ferme située non loin de là. Le simple exécutant reçoit environ 30 millions de francs (actuels) ! Les chefs beaucoup plus. C’est l’euphorie.
 
24 heures plus tard. Tous se sont séparés et la ferme est vide. Spectaculaire, non ! ?
 
Mais la police de sa Très Gracieuse Majesté a elle aussi agi très vite. « Une demi-heure » ? C’est le signe que le repaire des bandits se trouve dans un rayon de 30 minutes en voiture. La police quadrille la région en quelques heures. Les bandits avaient prévu de faire disparaître toutes les traces dans la maison mais à peine se sont-ils enfuis que Scotland Yard arrive. Ce sont donc des centaines d’empreintes qui sont à sa disposition !
 
Le reste est une question de routine : peu à peu, tous les gangsters vont être arrêtés. En janvier 1964, ils seront traduits en justice et condamnés à de très lourdes peines : de 15 à 25 ans de prison. La presse protestera à l’énoncé de condamnations si sévères alors qu’aucune mort d’homme n’avait été déploré (seul le mécanicien avait été assommé !).
 
Bruce Reynolds, en fuite à l’étranger, ne sera arrêté qu’en 1968. Libéré en 1978, il écopera, dans les années 80, de trois ans de prison pour trafic d'amphétamines. Ronald Biggs, lui, sera arrêté dans les premiers moments. Mais il s’évadera en 1965 de sa prison londonienne dans des conditions rocambolesques : un camion stationnant le long du mur d’enceinte à l’heure de la promenade, au toit ouvrant contenant une plate-forme manoeuvrée par un bras hydraulique, du haut de laquelle un complice lui lancera une corde !
 
Depuis lors, Biggs a vécu au Brésil qui a toujours refusé de l’extrader, changeant même d'apparence physique grâce à la chirurgie esthétique. Il est revenu en Angleterre en 2001 sur les instances de Reynolds pour se rendre, ruiné et malade. Il a été libéré en 2009 pour des raisons de santé et il est décédé le 18 décembre 2013.
 
Au final, convenons-en, la police aura fini par retrouver et identifier tous les protagonistes de l’affaire. Car, naturellement, la perfection n’est pas de ce monde, ainsi que l’apprirent tous les misérables croyant commettre le « crime parfait », oubliant le grain de sable fatal et se faisant finalement saisir par le bras séculier et implacable de la  Justice.
 
Tous sauf un, cependant. Un homme, le cerveau de l’affaire, qui, quelque part, se dit que, sans haine et sans violence, il a réalisé un forfait parfait, sans être jamais inquiété et dont il recueille peut-être encore les fruits aujourd’hui. Présenté, à tort, comme le "cerveau" de cette mythique attaque, Bruce Reynolds, est décédé le 28/02/2013 à l'âge de 81 ans au Royaume-Uni. 
 
Pas très moral cette chronique aujourd’hui, certes. Que cela ne vous empêche cependant pas de travailler honnêtement pour gagner votre pain à la sueur de votre front.
 
Courage ! Et bonne journée à tous.
 
La Plume et le Rouleau (c) 2001 Mise à jour  du 28/02/2013 et du 19/12/2013
 
Envie d'un roman policier de l'entre-deux-guerres ? Dans Derrière les lignes (Alterpublishing - 2017), l'écrivain Pierre Benoit mène l'enquête à Paris en 1925 pour démasquer un mystérieux tueur en série.

En 1981, Albert Spaggiari (casse de Nice, 1976) se rend à Rio de Janeiro et rencontre Ronald Biggs.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article

Archives

Articles récents