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LA PLUME ET LE ROULEAU

LA PLUME ET LE ROULEAU

250 chroniques éclairent le présent à la lumière de l'histoire


1981 : La pyramide du pharaon du LOUVRE

Publié par La Plume et le Rouleau sur 24 Septembre 2001, 16:00pm

Catégories : #Littérature & divers

Mes Chers Ami(e)s,
 
Plus qu’à la célébration de sainte Thècle, c’est à un anniversaire de vingt ans auquel je vous convie aujourd’hui (un anniversaire forcément rare puisque, vous le savez, on n’a pas tous les jours vingt ans).
 
Je vous ai invité, il y a une dizaine de jours, à aller au Louvre voir le zodiaque de Dendéra, longuement étudié par Champollion. C’est précisément du Louvre, dont je vais vous parler aujourd’hui, pour évoquer un évènement survenu le 24 septembre 1981...
 
Auparavant, rappelons que c’est au XIIème siècle que le roi de France Philippe Auguste décide de faire édifier, en sa bonne ville de Paris, une forteresse pour renforcer les défenses du royaume contre les incursions des Anglais, susceptibles d’arriver (perfidement) par la Seine pour attaquer Paris. 
Philippe Auguste fit donc édifier un rectangle de 69,35 mètres par 77,35 mètres de côté, flanqué de 10 tours, défendu par une barbacane (ouvrage fortifié avancé) et entouré de fossés de 12,5 mètres de large et de 7 mètres de profondeur. Au milieu : le donjon, un cylindre de 30 mètres de hauteur et de 15 mètres de diamètre. Au fin fond du cul-de-basse-fosse du donjon : des caves pour le trésor royal et... les prisonniers !
 
L’histoire du « Louvre » (on ne sait pas exactement l’origine du nom) vient de commencer. Ses transformations seront ultérieurement toujours du fait de la volonté royale.
 
A la Renaissance, François 1er fait raser le Donjon (il en reste le soubassement aujourd’hui).
 
Deux siècles plus tard, Louis XIV fait effectuer des travaux par l’italien Bernini et les français Le Vau, Le Brun et Perrault qui embelliront la façade, avant de quitter le palais pour Versailles.
 
Dans les années 1860, Napoléon III décide de confier à Haussmann le soin de réunir dans un même ensemble continu le Louvre et les Tuileries (en rasant purement et simplement les maisons intempestives).
 
En 1964, André Malraux ordonne des fouilles archéologiques qui permettront de saisir complètement l’empreinte des huit siècles et des multiples monarques qui ont façonné le monument de leurs décisions et de leur arbitraire.
 
Ainsi on imagine qu’enfin, grâce à la République, démocratique et collégiale, la frénésie urbanistique des divers régimes qui a conduit à empiler des styles tous plus différents les uns que les autres sur un même site va enfin cesser.
 
Mais non. La saga du Louvre ne va pas s’interrompre.
 
Car le 24 septembre 1981, il y a donc vingt ans aujourd’hui même, le pharaon François II, pardon, le président François Mitterrand, nouvellement sacré (je veux dire élu) réunit des journalistes et des ministres pour sa toute première grand’messe (pardon, conférence de presse) où il explique : « J’ai décidé, sans vouloir désobliger personne, de rendre le Louvre à sa destination ». Ce faisant : il déloge le Ministère des Finances de l’aile « Richelieu » (Nord) pour Bercy, expulse les automobilistes qui utilisaient jusque-là la cour comme parking et annonce des travaux architecturaux dans la cour carrée.
 
Pour ce qui concerne la « destination » du Louvre, je rappelle que celle-ci fut celle du logement du roi pendant six siècles et un musée seulement depuis 1793 (dans les faits, surtout depuis 1857 et sous l’impulsion de Napoléon III). En fait de retour à une prétendue « destination », il s’agit surtout de justifier une décision prise dans l’intimité du pouvoir personnel absolu, au mépris de toutes les règles républicaines.
 
Car savez-vous qu’en France, tout aménagement touchant un monument classé doit d’abord recevoir l’aval de la Caisse National des Monuments Historiques ? Et que, pour tout ouvrage financé par des deniers publics (vos impôts et les miens, donc), une sélection de l’architecte par voie de concours est obligatoire ? La moindre atteinte au patrimoine doit donc se décider lors d’une décision collégiale, émanant de professionnels, qui mettent en compétition plusieurs projets, lesquels sont obligatoirement rendus publics. 
 
Or François Mitterrand désigne personnellement et sans autre concertation qu’avec lui-même l’architecte sino-américain Ieoh Ming Pei en juin 1983 (par ailleurs un professionnel de qualité, mais là n'est pas la question). Celui-ci travaille sur divers projets qui sont soumis au seul monarque (pardon, au président) en exercice, lequel choisit enfin, dans le silence de ses réflexions, celui qui avait vocation à voir le jour.
 
Ce n’est qu’ensuite, que l’on réunit, le 23 janvier 1984, la Commission Supérieure des Monuments Historiques, sommée d’entériner l’oukase mitterrandien. 
Aujourd’hui, la pyramide de celui que la presse surnomma « Tontonkhamon » ne suscite plus de débat, ni sur le fond ni sur la forme. Il ne subsiste plus grand’chose de la polémique sur la politique mitterrandienne architecturale grandiose (L’Opéra-Bastille, la Grande Arche, la Très Grande Bibliothèque)... dont les équilibres financiers ne constituent, par ailleurs, pas le trait dominant...
 
La géométrie cristalline et incongrue de la pyramide au milieu des façades Renaissance s’est définitivement inscrite dans le paysage monumental parisien et réjouit les yeux de beaucoup.
 
Au-delà du regard des touristes, quelque chose d’autre, néanmoins, subsiste encore au Louvre.
 
Un fantôme.
 
Pas seulement celui de Belphégor, filmé pour la première fois en 1927 par Henri Fontaine, qui fit l’objet d’une série télévisée en 1965 sur la TV française et d'un remake en 2001.
 
Non, un autre fantôme.
 
Le spectre d’un ermite errant dans les couloirs. Jetant son ombre inquiétante sur les murs séculaires. Glissant sans bruit derrière les statues hiératiques. Apparaissant soudainement près des oeuvres de maîtres. Et, dès qu’on veut l’attraper, s’évanouissant dans un grincement ironique.
 
Ce fantôme-là, je parie qu’il vient déjà hanter le sommeil de tous les candidats à l’élection présidentielle et se moquer d’eux : « Ah ! Ah ! Ah ! Imbéciles... ! »
 
Bonne journée à tous.
 
La Plume et le Rouleau (c) 2001
 
Pour d'autres récits de mystères et de secrets, plongez-vous dans La cinquième nouvelle... 
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